Rolf Thung – 2023
J’ai connu Rolf à Zurich lors de mon premier tournoi ATP en 1977. Un an plus jeune que moi, il est pourtant déjà alors au crépuscule d’une carrière qui l’a vu représenter les Pays-Bas en Coupe Davis, accéder au 86ème rang ATP en simple et avoir eu le privilège de perdre contre Ken Rosewall, 40 ans, et Rod Laver, 38 ans. En 1977, Il considérait alors qu’il avait atteint son niveau maximum et a entrepris une carrière brillante dans le monde « normal ».
Gaucher, il possède actuellement les coups les plus rapides de sa catégorie d’âge et conduit le jeu avec son service et son coup droit à la manière de Goran Ivanisevic ou d’Hugo Humbert. Il n’aime pas trop défendre car il traîne une blessure récurrente au genou qui le diminue dans les fins de tournois et l’a fait perdre notamment la finale du simple des championnats du monde 2022.
Quand je lui dis que je suis malheureux pour lui, il me rétorque qu’il est habitué à gérer cette douleur qui disparaît en une semaine quand il s’arrête à temps et qui ne l’empêche pas de prendre toujours beaucoup de plaisir à jouer.
Jairo Velasco-Ramirez – 2022
Joueur espagnol droitier, né à Bogota en 1947, a signé son premier exploit en battant à Rome en 1972 Jimmy Connors, alors déjà aux alentours de la 10ème place mondiale (le classement ATP n’existait pas encore). Sa dernière grande performance fut l’élimination de Peter McNamara (n°10 ATP) à Aix en Provence en 1982 qui lui a permis d’accéder à son meilleur niveau, n°46 ATP, à l’âge de 35 ans.
Après une dizaine d’années comme entraîneur, il commence à jouer sur le circuit senior, remporte son premier titre mondial en simple chez les 45 ans en 1994 à Buenos-Aires puis deux autres en suivant. Une prothèse à la hanche droite, puis une autre à la gauche ne l’empêchent pas de gagner des titres avec l’équipe d’Espagne mais ont limité ses performances en simple. Un meilleur physique et une nouvelle raquette le ramènent au plus haut niveau dans sa nouvelle patrie, à Majorque, où il signe un triplé aux championnats du monde 2021.
Quand il revient sur sa carrière il avoue que le tennis lui a tout donné et, qu’en retour, il a construit sa vie autour de ce jeu. Son toucher de balle qui lui permet d’utiliser à merveille lob et amortie est mis en valeur par une science du jeu exceptionnelle. Ce sont ces mêmes qualités qu’il avait à 25 ans et qu’il a toujours à 75. En revanche sur le plan tactique, il a beaucoup évolué. Il est passé d’un profil de défenseur acharné à celui d’attaquant joueur.
Il est heureux sur le Senior Masters Tour où il retrouve des amis, prend le temps de partager un verre avec eux et de visiter les pays où il passe. Ce qu’il n’avait pas le temps de faire quand il était sur le circuit ATP, devant enchaîner les compétitions pour gagner sa vie. Il remarque sans regret qu’en 18 ans de carrière pro, il a gagné beaucoup moins d’argent que son fils (spécialiste du double) en beaucoup moins de temps ! Sur le Senior Masters Tour, son niveau (13 titres de champion du monde individuel et au moins autant en équipes) font qu’il est souvent invité.
Reinhilde Adams – 2022
Joueuse allemande, droitière, née en 1951, est devenue n°1 mondiale des plus de 70 ans en octobre 2021 à Majorque en survolant les championnats du monde. Elle le doit certes pour partie aux absences des joueuses des Etats-Unis et d’Australie qui n’ont pas fait le déplacement à cause des contraintes liées au covid-19, mais beaucoup aussi à son mental de fer et à ses progrès au tennis, sport qu’elle n’a commencé à pratiquer qu’à l’âge de 34 ans.
Issue d’une famille de musiciens, Reinhilde n’avait pratiqué le sport qu’à l’école et découvrira le tennis lorsqu’avec son mari ils décideront de mettre leurs enfants à l’école de tennis de Moenchengladbach. Elle a eu alors envie de s’y mettre aussi et s’est vite passionnée au point de participer à des compétitions à partir de 37 ans.
Le déclic qui l’a finalement conduite à vouloir progresser est venu 3 années plus tard. Reinhide perd contre Irmgard Gerlatzka, pourtant 12 ans plus âgée qu’elle. Cette défaite l’aiguillonne et depuis, elle s’entraîne deux fois par semaine avec un professeur et participe régulièrement aux compétitions de vétérans.
Elle intègre discrètement l’équipe d’Allemagne des 55 ans à Durban (Afrique du Sud) en 2006. En 2016, la compétition de tennis devient sa principale activité qui lui permettra d’atteindre le Graal en 2021, remportant le simple, le mixte et la Maureen Connolly Cup (plus de 70 ans).
Reinhilde Adams considère que son mental est sa principale force et que son plus gros défaut est son jeu de volée qu’elle travaille dorénavant en priorité à l’entraînement.
King van Nostrand (Etats-Unis) – 2022
En 2022, à 87 ans, King Van Nostrand a gagné son 47ème titre mondial chez les Seniors. Il pense avoir la même envie de gagner un tournoi que Rafael Nadal : « Les principaux plaisirs du Senior Masters Tour que sont les voyages, la camaraderie, la compétition et la célébration de la victoire sont les mêmes que sur le circuit professionnel. La principale différence vient sans doute du bénéfice santé. Indéniable chez les Seniors, et il se demande si quelques pros ne s’abîment pas le corps en lui demandant toujours plus ».
John Shannon (Irlande) – 2021
« A partir de 35 ans, j’ai dû abandonner le football gaélique pour un sport moins violent. Je suis devenu joueur de tennis et suis tombé amoureux de ce sport instantanément. J’ai lu quelque part que celui qui pratique le tennis a une bonne chance de vivre 10 ans plus vieux que n’importe qui. Pourquoi s’en priver ? »
Peter Pokorny – 2019 : lisez Tennis is my life
Joueur autrichien, gaucher né en 1940, il a joué 14 rencontres de Coupe Davis. Il joue sur le circuit senior depuis les années 90. Il s’y est forgé un très beau palmarès avec 27 titres mondiaux individuels.
Roger Taylor – 2018
Joueur anglais gaucher, né en 1941, a battu les meilleurs joueurs mondiaux parmi lesquels Rod Laver en 1970 à Wimbledon, mettant ainsi fin à une série de 31 victoires consécutives du n°1 mondial dans le temple du tennis. Après sa carrière, il devint capitaine de Coupe Davis.
Il joue maintenant sur le circuit senior où il a atteint la 10ème place mondiale en 2016. Pendant quelques années, il a dû servir de la main droite après une blessure au biceps gauche.

En 2018, il a joué le tournoi de Bordeaux à la Villa Primrose où il a donné une interview au journal Sud-Ouest. Il y relate notamment sa victoire contre Bjorn Borg à Wimbledon en 1973.
Mark Cox – 2017
Joueur anglais, gaucher né en 1943, a atteint 3 fois les huitièmes de finale du simple de Wimbledon. Il fait partie, comme Roger Taylor ou Tim Henman des joueurs que l’Angleterre rêvait de voir succéder à Fred Perry comme dernier vainqueur du « Championship » avant qu’Andy Murray y parvienne en 2013.
Au cours de sa carrière, il a battu de nombreux numéros 1 du tennis comme Ken Rosewall, Lewis Hoad, Rod Laver, Roy Emerson, Jimmy Connors, Bjorn Borg, John Newcombe, ou Ivan Lendl. Il reste le premier amateur à avoir battu un professionnel, Pancho Gonzales, au tournoi de Bournemouth en 1968.
Il est fier d’avoir pu parfois traiter d’égal à égal avec les meilleurs de son sport. Mais pour lui, il n’était pas question de fortune, de renommée ou d’exposition de ses trophées mais simplement d’amour du sport et de la compétition.
Il est depuis plus de 10 ans sur le circuit senior et déclare : « c’est un miracle de voir tous ces gens courir dans tous les coins du court, se défiant eux-mêmes, prolongeant leur vie en prenant un sacré bon temps. Le tennis m’a accompagné toute ma vie. Nous sommes bénis de pouvoir vivre notre passion et de le faire plutôt bien. Nous avons beaucoup de chance ! »
Read in english : A tennis life well lived
Michel Charlemagne – 1995
Il n’est pas nécessaire d’avoir été un champion pour prendre du plaisir en participant à des compétitions seniors.
Joueur de club français, droitier, né en 1932, Michel Charlemagne adore le tennis. Il fut aussi champion du monde de scrabble et a beaucoup réfléchi à la manière d’aborder le tennis quand on est senior. Il l’explique avec beaucoup d’humour :
« Vos tempes ont blanchi et vos adversaires au lieu de se battre tout seuls comme naguère, ont tendance, dès le premier échange, à vous distiller un amorti suivi d’un lob. Il faut faire quelque chose. Commencez par refuser de jouer ailleurs que sur terre battue. Si votre région organise son championnat annuel sur dur, boycottez, protestez et menacez. Puis échangez votre raquette en composite aussi tendue que l’arc d’Ulysse contre un tamis géant. Faites-la tendre à 15 kilos. Vous aurez troqué ainsi votre planche contre une fronde. N’ayant pu être le Mike Tyson du tennis, vous en serez le David. Maintenant opérez une révolution copernicienne dans votre conception du jeu. Installez-vous un mètre devant la ligne de fond. Votre écumoire vous permettra de jouer long sans effort. Vous qui avez toujours joué au garde-à-vous, vous devrez enfin plier les jambes et effectuer force volées et demi-volées sans compter de nombreux coups de raccroc. Si on vous joue long et dans les angles, dites bravo et passez au point suivant. Votre nouveau style de jeu vous fera gagner dix ans sur l’époque où, reconverti au golf, vous oscillerez entre la frappe de mottes et l’airshot. »
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